Pour satisfaire les usages domestiques, les besoins des activités industrielles et agricoles ainsi que de production d’énergie, des prélèvements sont effectués dans les eaux de surface et les eaux souterraines.
En 2014, 29,9 milliards de m3 d’eau ont ainsi été prélevés en France. Les consommateurs d’eau potable ont utilisé 5,4 milliards de m3 soit environ 18 % du total prélevé. L’industrie et l’irrigation occasionnent des prélèvements comparables, autour de 3 milliards de m3. Le secteur de l’énergie prélève quant à lui 18,8 milliards de m3 (près de 63 % du total prélevé).
Ces prélèvements se font en majorité dans les eaux de surface (81 %), sauf pour l’eau potable pour laquelle le recours aux eaux souterraines est fréquent, étant généralement de meilleure qualité.
Ces 10 dernières années, la tendance des prélèvements pour ces quatre usages est à la baisse. Cette évolution reste toutefois très dépendante des conditions clima- tiques et des pratiques de production, notamment agricoles.
Les prélèvements ne représentent que très partiellement les pressions réelles exercées par les activités humaines sur la ressource en eau. En effet, il est important de distinguer le prélèvement (quantité soustraite au milieu à un instant donné) et la consommation (différence entre la quantité prélevée et la quantité restituée dans le milieu ou encore les volumes qui, après usage, ne sont pas restitués au cycle de l’eau continental).
C’est la consommation qui traduit donc véritablement la pression exercée sur le milieu. Elle est variable selon les usages.
Le secteur de l’énergie, par exemple, représente plus de 60 % des prélèvements totaux, mais en restitue la majeure partie aux cours d’eau après utilisation. En revanche, le sec- teur agricole ne prélève que 10 % des volumes d’eau mais consomme plus de la moitié de ses prélèvements (non restitués aux cours d’eau et aux eaux souterraines car évaporés, retenus par les plantes).
La consommation d’eau peut donc conduire à des déséquilibres locaux, occasionnels ou chroniques, compromettant le respect du « bon état » des milieux aquatiques et des eaux souterraines ainsi que la satisfaction de besoins futurs.
Les différents usages de l’eau | Eaux de surface | Eaux souterraines | TOTAL | ||
---|---|---|---|---|---|
Alimentation en eau potable | 1,9 | 35,2% | 3,5 | 64,8% | 5,4 |
Usage industriel | 1,7 | 60,7% | 1,1 | 39,3% | 2,8 |
Usage agricole | 1,9 | 65,5% | 1 | 34,5% | 2,9 |
Production d’énergie | 18,8 | 100% | 0 | 0% | 18,8 |
Tous usages | 24,3 | 81,3% | 5,6 | 18,7% | 29,9 |
Tous usages hors énergie | 5,5 | 49,6% | 5,6 | 50,4% | 11,1 |
6Sources : Agences de l’Eau (2014), Insee (2015) - Traitement : SOeS (2015)6
Notes :
— > Les eaux de surface (ou superficielles) sont des eaux qui coulent (fleuves, rivières) ou qui stagnent (lacs, étangs, mares, terres humides, canaux artificiels,...) à la surface du sol.
— > Les eaux souterraines sont des masses d’eau de pluie infiltrée dans le sous-sol et contenue dans une roche poreuse ou fissurée, appelées nappes (nappes souterraines ou nappes aquifères).
— > La production d’énergie ne tient compte que des prélèvements des centrales nucléaires. Les prélèvements en mer et en eau saumâtre des centrales nucléaires, très importants, ne sont pas comptabilisés ; pour exemple les prélèvements de la centrale de Blayais, en Aquitaine, qui se font dans l’estuaire de la Gironde et qui s’élèvent à 4,8 milliards de m3 en 2012 (donc non pris en compte dans le tableau ci-dessus et sur la carte ci-dessous).
— > Ces données permettent de donner un ordre de grandeur des volumes d’eau prélevés et de leur répartition selon les usages. En effet, les prélèvements sont estimés à partir des déclarations faites aux agences de l’eau au titre de la redevance et cette dernière n’est pas obligatoirement dûe. Certains usages sont exonérés ; certains prélèvements non déclarés.
En 2014, les prélèvements d’eau en Aquitaine représentent 765 millions de m3
(62 % des prélèvements de la nouvelle région Aquitaine Limousin Poitou-Charentes).
Ces prélèvements se font majoritairement dans les eaux souterraines (70 %), notamment ceux destinés à l’alimentation en eau potable. Les ressources en eau stockées dans les retenues collinaires sont par contre de plus en plus utilisées par les agriculteurs.
Note : —> Mm3 = millions de m3
Le réseau hydrographique de l’Aquitaine est dense et diversifié. Le régime d’écoulement pluvial océanique (basses eaux estivales et hautes eaux hivernales) domine dans le bassin aquitain, tandis que les cours d’eau du massif pyrénéen sont davantage influencés par la fonte des neiges (hautes eaux au printemps, période de basses eaux plus longue).
Les eaux souterraines représentent également d’importantes ressources. Différents types de nappes se juxtaposent : les nappes profondes généralement captives, que l’on retrouve à différentes profondeurs, et au-dessus, des nappes superficielles, principalement libres, souvent en relation avec les rivières.
Cependant, la conjonction de périodes de sécheresse et de prélèvements très importants peut engendrer une baisse préoccupante du niveau d’eau dans certaines nappes et dans certaines rivières.
Un déficit pluviométrique important d’octobre à mars engendre en effet un faible remplissage des nappes libres et ne permet pas des niveaux d’eau satisfaisants dans les rivières en été. Ce phénomène est amplifié si le printemps et l’été sont également secs. Ces nappes libres ne peuvent alors pas assurer leur rôle de soutien de débit d’étiage des rivières ; et de façon générale, l’Aquitaine se caractérise par une faiblesse chronique des débits d’étiage estivaux.
La concentration des besoins au cours de cette période (agriculture, tourisme) peut donc se heurter localement aux disponibilités en eau. Certains bassins disposent toutefois d’un soutien d’étiage grâce aux barrages, ouvrages qui sont de véritables réservoirs.
En 2014, les prélèvements d’eau du Limousin représentent 88 millions de m3
(7 % des prélèvements de la nouvelle région Aquitaine Limousin Poitou-Charentes).
Ces prélèvements se font majoritairement dans les eaux de surface (70 %) ; seule l’utilisation pour l’alimentation en eau potable puise dans les eaux souterraines, essentiellement pour des raisons de qualité.
Le climat du Limousin est de type océanique dégradé et se caractérise par des pluies abondantes. Mais c’est une région située sur le socle, donc avec des terrains imperméables (la pluie s’infiltre très peu dans le sol) et très peu de nappes souterraines.
La disponibilité de la ressource est donc très dépendante d’apports pluviométriques réguliers. Du fait de leur imperméabilité, les bassins réagissent très fortement à la pluviométrie par ruissellement. Mais en saison très sèche, les débits, non soutenus par des nappes phréatiques importantes, connaissent de fortes variations. Il n’y a pas de réapprovisionnement des rivières l’été par les nappes, contrairement aux terrains calcaires où l’eau, en abondance l’hiver, alimente les nappes souterraines, qui elles-mêmes l’été alimentent les rivières.
C’est également une région qui se caractérise par une densité très forte de petit cours d’eau, de petits chevelus qui sont très sensibles l’été puisqu’ils ont des débits relativement faibles. En période d’étiage assez sévère (absence de précipitations, températures un peu fortes) les rivières tarissent rapidement.
Lors de ces épisodes de sécheresse, la pénurie de la ressource en eau a des conséquences sur les usages (manque d’eau pour la production agricole et alimentation en eau potable perturbée dans certaines zones).
En 2014, les prélèvements d’eau en Poitou-Charentes représentent 373 millions de m3 (31 % des prélèvements de la nouvelle région Aquitaine Limousin Poitou-Charentes).
La répartition des prélèvements selon l’origine (eaux de surface et eaux souterraines) est à peu près équivalente tous usages confondus (50 % / 50%). Par contre, elle varie nettement selon les usages : les industries, ainsi que la centrale nucléaire, utilisent essentiellement de l’eau de surface.
En Poitou-Charentes, les ressources en eau, superficielles ou souterraines sont abondantes ; mais, comme en Aquitaine, un contexte estivale particulier entraîne des situations récurrentes de tension sur la ressource. Elle est en effet très fortement sollicitée pour différents usages au moment où elle est déjà naturellement à son niveau le plus bas (irrigation, consommation d’eau potable majorée par le tourisme, refroidissement de la centrale). Cette pression est d’autant plus marquée que la pluviométrie antérieure est parfois déficitaire et que le manque de pluies s’étale sur une période de plus en plus longue (avril à septembre).
On assiste alors à une baisse importante du niveau de certaines nappes et un tarissement des cours d’eau. Un faible remplissage des nappes ne permet pas des niveaux d’eau satisfaisants dans les rivières l’été car les nappes libres, qui sont majoritairement sollicitées, ne peuvent pas jouer leur rôle de soutien des débits d’étiage des rivières. On assiste alors à une sévérité des étiages pouvant aller jusqu’à l’assec et devenant de plus en plus long, jusqu’à se prolonger à la fin de l’automne.
Les sollicitations excèdent, dans de nombreux secteurs, ce que le milieu peut fournir.
Les différents usages de l’eau | Eaux de surface | Eaux souterraines | TOTAL | ||
---|---|---|---|---|---|
Alimentation en eau potable | 102,7 | 21% | 388,5 | 79% | 491,2 |
Usage industriel | 133,5 | 75% | 44,5 | 25 % | 178 |
Usage agricole | 136,5 | 30% | 315,4 | 70 % | 451,9 |
Production d’énergie | 105 | 100% | 0 | 0% | 105 |
Tous usages | 477,7 | 39% | 748,3 | 61% | 1226 |
Tous usages hors énergie | 372,7 | 33% | 748,3 | 67% | 1121 |
6Sources des données : Agences de l’Eau Loire-Bretagne et Adour-Garonne, EDF, SOeS. Traitement ORE6
En conséquence, la gestion de la ressource n’est pas équilibrée puisque la gestion des prélèvements ne garantit pas le respect de la faune et de la flore aquatique et est à l’origine de conflits d’usage.
L’objectif de gestion équilibrée de la ressource est visé par la loi sur l’eau inscrite dans le Code de l’Environnement et par la Directive Cadre sur l’Eau (D.C.E.).
Une gestion équilibrée de la ressource en eau se caractérise par l’atteinte de l’équilibre entre les prélèvements par l’Homme et les besoins liés à l’alimentation des eaux de surface et la recharge naturelle des eaux souterraines.
Plus spécifiquement, la DCE parle de bon état quantitatif des eaux, et stipule qu’il est atteint lorsque les prélèvements ne dépassent pas la capacité de renouvellement des nappes souterraines, compte tenu de la nécessaire alimentation en eau des écosystèmes aquatiques de surface et des zones humides directement dépendantes.
Plus concrètement, une ressource en eau fait l’objet d’une gestion quantitative équilibrée lorsque les volumes prélevés permettent de respecter les Débits d’Objectifs d’Etiage (DOE), c’est-à-dire de satisfaire l’ensemble des usages ainsi que le fonctionnement des milieux aquatiques 8 années sur 10 en moyenne.
Une zone de répartition des eaux (ZRE) se caractérise par une insuffisance, autre qu’exceptionnelle, des ressources par rapport aux besoins. Un classement en ZRE est destiné à permettre une meilleure maîtrise de la demande en eau, afin d’assurer au mieux la préservation des écosystèmes aquatiques et la conciliation des usages économiques de l’eau. Une ZRE se caractérise donc par l’application de règles plus contraignantes (limitation de nouvelles autorisations, abaissement des seuils de prélèvements...).
Une très grande partie du territoire est classée en Zone de Répartition des Eaux.
Cela témoigne des difficultés récurrentes rencontrées en région. Ces zones correspondent en effet à des bassins, sous-bassins ou fractions de sous- bassins hydrographiques ou du système aquifère, dans lesquels l’importance de la sollicitation quantitative de la ressource entraîne un déséquilibre entre ressources et besoins en eau et, par suite, des conflits d’usage engageant une collectivité d’intérêts et rendant nécessaires des mesures permanentes de répartition des prélèvements.
Malgré leur classement en ZRE depuis 2003, certains de ces bassins connaissent encore des déficits chroniques.
Des dispositifs réglementaires sont mis en place dans le cas de gestion de crise liée à l’eau afin de trouver une meilleure adéquation entre les besoins et la disponibilité de la ressource.
Au 6 août 2015, par exemple, 69 départements étaient concernés par au moins un arrêté préfectoral limitant certains usages de l’eau en France. Tous les départements de la région étaient concernés.
Sur certains bassins, la gestion de crise est déclenchée pratiquement tous les ans, même en situation météorologique favorable.