1.1. Le contexte législatif européen dans le domaine de l’eau
1.2. Présentation de la D.C.E. et de ses principaux objectifs
1.3. Les nouveautés apportées par la D.C.E.
1.4. La méthode de travail et les grandes échéances de la D.C.E.
1.5. Blue Print : un nouveau plan d’action pour la sauvegarde des
ressources en eau en Europe
1.1. Le contexte législatif européen dans le domaine de l’eau
Depuis une quarantaine d’années, la politique
publique de l’eau en France s’inscrit dans un cadre
européen. Très rapidement, la priorité a été mise sur la
protection des eaux utilisées par l’Homme ce qui a conduit
à suivre de près la qualité de l’eau et ses différents usages.
Une trentaine de directives sur l’eau ont ainsi été mises
en oeuvre au sein de l’Union Européenne fixant un cadre
général qui précise, notamment en matière de gestion et de
protection de l’eau, des contraintes minimales encadrant
la réglementation pour chaque État membre. Les premiers
textes adoptés furent notamment des directives relatives
à la qualité des eaux brutes superficielles destinées à
l’alimentation humaine, des eaux de baignade, des eaux à
vocation piscicole ou encore des eaux conchylicoles.
Les directives sur l’eau étant cependant trop
nombreuses, il a été jugé nécessaire de regrouper les
objectifs fixés par certaines d’entre elles au sein d’une
directive cadre posant les bases d’une nouvelle logique en
matière d’eau : la Directive Cadre sur l'Eau (D.C.E.).
Les cours d’eau ne s’arrêtant pas aux frontières de chaque
pays, l’approche européenne est apparue primordiale pour
une gestion de l’eau concertée et organisée entre les pays
membres.
La D.C.E. a ainsi mis en avant une approche intégrée de
la politique de l’eau de l’Union Européenne. Celle-ci est
centrée sur le concept de gestion des eaux par grand
bassin hydrographique avec pour objectif d’atteindre
d’ici à 2015 le bon état de toutes les eaux de l’Union
Européenne.
1.2. Présentation de la D.C.E. et de ses principaux objectifs
La D.C.E. adoptée le 23 octobre 2000 (publiée
au Journal Officiel des Communautés Européennes en
décembre 2000), constitue la pièce législative centrale
dans laquelle sont regroupées les principales obligations
concernant la gestion de l’eau de l’Union Européenne. Elle
marque une évolution conceptuelle importante des textes
européens : le passage d’une approche orientée « usages »
à une approche axée sur la préservation des milieux. Cette
nouvelle approche européenne coïncide avec l’expérience
de la France en la matière depuis 40 ans.
Ce texte synthétise et simplifie toutes les directives
concernant les eaux continentales et maritimes déjà
mises en place, basées sur un système de gestion par
bassin hydrographique.
La Charente à Taizé-Aizie (Charente)
Il apporte une obligation de résultats : atteindre un bon
état des eaux en 2015.
Les objectifs essentiels de la directive sont les
suivants :
axer la politique communautaire de l’eau sur une
logique de bassin hydrographique, en suivant
l’eau telle qu’elle s’écoule naturellement de la
source jusqu’à la mer,
prendre en considération toutes les eaux : eaux
de surface et eaux souterraines, eaux douces,
eaux côtières, et estuaires,
atteindre, à l’horizon 2015, un bon état de toutes
ces eaux, ce qui signifie un bon état écologique et
un bon état chimique des eaux de surface, ainsi
qu’un bon état qualitatif et quantitatif des eaux
souterraines,
recenser toutes les zones nécessitant une
protection spéciale. Il s’agit des zones visées par
la législation communautaire existante, ainsi que
des zones de captage des eaux potables et de
toutes autres zones visées par une législation
nationale,
adopter une approche combinée entre d’une
part les normes de qualité environnementale,
et d’autre part les valeurs limites d’émissions
basées sur les meilleures techniques disponibles,
en retenant l’approche donnant les normes les
plus strictes,
concrétiser immédiatement cette approche pour
les substances dangereuses prioritaires pour
la Communauté, c’est à dire les identifier, et
établir pour elles, en priorité, les valeurs limites
d’émission et les normes de qualité,
établir un plan de gestion par district
hydrographique,
prendre en compte le principe de récupération
des coûts des services liés à l’eau, en intégrant
le principe du pollueur-payeur institué par le
Traité de l’Union Européenne. En quelque sorte,
l’objectif est que « l’eau paye l’eau »,
accroître la participation du public, en l’informant
plus, et mieux, et en l’associant à la prise de
décision.
Les délais prévus depuis l’adoption en 2000 de D.C.E.
sont les suivants :
9 ans pour faire les diagnostics et fixer les
objectifs,
12 ans pour mettre en place des programmes
d’actions opérationnels,
15 ans pour parvenir à un bon état des eaux
(des dérogations sont possibles face à des
circonstances particulières),
20 ans pour éliminer les substances dangereuses
des rejets d’eaux usées.
Avec l’adoption et la mise en oeuvre de la D.C.E.,
différentes directives sur l’eau sont progressivement
abrogées et remplacées par de nouvelles mesures
complémentaires. Les dernières directives filles adoptées
sont les suivantes :
la directive 2006-7-CE du 15 février 2006
concernant la gestion de la qualité des eaux de
baignade
la directive 2006/118/CE du 12 décembre 2006
sur la prévention et le contrôle de la pollution des
eaux souterraines
la directive inondations 2007/60/CE du 23
octobre 2007
la directive cadre stratégie pour le milieu marin
2008/56/CE du 17 juin 2008
la directive 2008/105/CE du 16 décembre
2008 établissant des normes de qualité
environnementale dans le domaine de l’eau
Certaines directives plus anciennes sont toujours en
vigueur parmi lesquelles :
la directive 1991/271/CE du 21 mai 1991 relative
au traitement des eaux urbaines résiduaires
(DERU) qui impose notamment des obligations de
collecte et de traitement des eaux usées
la directive 1991/676/CE du 12 décembre 1991
sur la protection des eaux contre la pollution par
les nitrates d’origine agricole, dite le plus souvent
directive nitrates
la directive 1998/83/CE du 3 novembre 1998
relative à la qualité des eaux destinées à la
consommation humaine
1.3. Les nouveautés apportées par la D.C.E.
Une obligation de résultats : atteindre un bon état des eaux en 2015
En savoir plus dans la rubrique " L’atteinte du bon état des eaux "
La gestion par grand bassin
La D.C.E. préconise une gestion globale de la
ressource en eau selon un découpage en grands districts
hydrographiques assimilés globalement aux bassins
versants.
Cette disposition est nouvelle à l’échelle européenne,
mais pas en France, qui l’a inscrite depuis longtemps dans
son système de gestion de l’eau.
En effet, la première loi sur l’eau de 1964 a institué les
comités de bassins et les agences de l’eau, chargés
d’animer la concertation et de mettre en oeuvre une
solidarité financière entre les différents usagers de l’eau
sur le territoire des 6 grands bassins français (Comité de
bassin Loire Bretagne, 2006).
La transparence des coûts
Chacun d’entre nous dégrade la qualité de l’eau,
d’où un préjudice pour les autres utilisateurs qui doivent
financer la dépollution de l’eau. La D.C.E. demande d’établir la
« transparence des coûts » liés à la réparation des dommages
causés à l’environnement, pour appliquer correctement le
principe pollueur-payeur, ou mettre en place une tarification
incitative (France Nature Environnement, 2008b).
L’ application de la D.C.E. suppose également :
l’information et la prise en compte de la
récupération des coûts et des services, y compris
des coûts environnementaux. La directive
n’impose pas une récupération totale des coûts.
le principe de « récupération des coûts » consiste
à établir une correspondance entre les coûts
associés aux différentes utilisations de l’eau
et leur prise en charge par les usagers qui les
engendrent.
la création d’une exigence de transparence.
Il est aussi demandé de publier les données
disponibles sur l’économie locale du service de
l’eau (taux de couverture des coûts par le prix
de l’eau, origine des financements, application
du principe pollueur-payeur) (Comité de bassin
Loire-Bretagne, 2004).
la place de l’analyse économique, actuellement
prise en compte dans les SAGE (Schéma
d’Aménagement et de Gestion des Eaux) est
renforcée.
la justification des éventuels reports et
dérogations nécessaires à la réalisation des
objectifs,
la mise au point d’une tarification de l’eau
incitative à une bonne gestion des eaux.
La participation de tous les acteurs
et la consultation du public
La D.C.E. prévoit que les acteurs de l’eau, ainsi que le
grand public, soient consultés et appelés à se prononcer
régulièrement. Leurs avis seront pris en compte pour
élaborer les nouveaux programmes de lutte contre les
pollutions (les Schémas Directeurs d’Aménagement et
de Gestion des Eaux et les programmes de mesures
associés).
Article 14 de la D.C.E. - Information
et consultation du public
« 1. Les États membres encouragent la participation
active de toutes les parties concernées à la mise
en oeuvre de la présente directive, notamment à la
production, à la révision et à la mise à jour des plans de
gestion de district hydrographique. Les États membres
veillent à ce que, pour chaque district hydrographique,
soient publiés et soumis aux observations du public, y
compris des utilisateurs :
a) un calendrier et un programme de travail pour
l’élaboration du plan, y compris un relevé des mesures
qui seront prises en matière de consultation, trois ans
au moins avant le début de la période de référence du
plan
b) une synthèse provisoire de questions importantes
qui se posent dans le bassin hydrographique en matière
de gestion de l’eau, deux ans au moins avant le début de
la période de référence du plan
c) un projet de plan de gestion de district
hydrographique, un an au moins avant le début de
la période de référence du plan. Sur demande, les
documents de référence et les informations utilisées
pour l’élaboration du projet de plan de gestion sont mis
à disposition.
2. Les États membres prévoient au moins six mois
pour la formulation par écrit des observations sur ces
documents, afin de permettre une consultation et une
participation actives.
3. Les paragraphes 1 et 2 s’appliquent également à la
version mise à jour du plan. »
1.4. La méthode de travail et
les grandes échéances de la
D.C.E.
La Directive Cadre sur l’Eau définit une méthode
de travail, commune aux 27 États membres de l’Union
Européenne, qui repose sur quatre documents :
l’état des lieux : il permet d’identifier les
problématiques à traiter
le plan de gestion : il correspond au SDAGE qui fixe
les objectifs environnementaux
le programme de mesure : il définit les actions qui
vont permettre d’atteindre les objectifs
le programme de surveillance : il assure le suivi de
l’atteinte des objectifs fixés.
Pour les 3 premiers documents, un renouvellement est à
faire tous les 6 ans.
Un calendrier indiquant les grandes échéances de la
mise en oeuvre de la D.C.E. a été mis en place :
23 Octobre 2000 : adoption de la D.C.E. par le
Parlement Européen et le Conseil
2004 : réalisation d’un état des lieux pour chaque
bassin. État des pollutions et des besoins
2005 : consultation du public sur les principaux
enjeux, planning et programme de travail pour la
révision du SDAGE
2006 : avant-projet de SDAGE afin de définir les
orientations du IXème programme d’intervention
des agences de l’eau qui sera adopté fin 2006 par
les Comités de bassin.
2007/2008 : réalisation d’un projet de SDAGE qui
sera soumis à la consultation du public.
y y Du 15 avril au 15 octobre 2008 : consultation du
public sur le projet de SDAGE et son programme
de mesures
du 10 janvier au 10 mai 2009 : consultation des
acteurs institutionnels sur les projets de SDAGE
et de Programme de Mesures
fin 2009 : adoption du SDAGE par le Comité
de bassin puis approbation par le préfet
coordonnateur de bassin
1er janvier 2010 : application du SDAGE 2010-
2015
novembre 2012 à avril 2013 : consultation du
public et des acteurs de l’eau pour préparer le
SDAGE 2016-2021
fin 2012 : bilan à mi-parcours du programme de
mesures
mi 2013 : tableau de Bord du SDAGE 2010-2015
(bilan à mi-parcours)
2015 : compte rendu auprès de l’Europe sur
l’atteinte des objectifs fixés
2027 : dernière échéance pour la réalisation des
objectifs
Calendrier des grandes échéances de mise en oeuvre de la Directive Cadre sur l’Eau
1.5. Blue Print : un nouveau plan d’action pour la sauvegarde des
ressources en eau en Europe
Blue Print est le nouveau plan d’action pour la
sauvegarde des ressources en eau de l’Europe, lancé par
la Commission Européenne pour accompagner la mise en
oeuvre des objectifs de la Directive Cadre sur l’Eau. Il ne s’agit pas d’un instrument réglementaire et il ne s’inscrit
pas dans une optique de révision de la D.C.E..
Il s’agit avant tout d’une stratégie visant à assurer la
disponibilité sur le long terme d’une eau de qualité en
quantité suffisante pour répondre aux besoins des
populations, de l’économie et de l’environnement.
Trois volets d’action sont proposés dans ce plan :
soutenir et améliorer la mise en oeuvre de la
politique de l’eau actuelle,
favoriser l’intégration des objectifs de la politique
de l’eau dans d’autres domaines d’action comme
l’agriculture et le transport par exemple,
combler les lacunes du cadre existant en
proposant de nouveaux objectifs, en particulier
pour tout ce qui est lié à la comptabilité
de l’eau, à l’utilisation rationnelle de cette
ressource. Dans ce cadre, des normes de l’Union
Européenne devraient être mises en oeuvre pour
la réutilisation de l’eau.
La réalisation du plan s’appuiera sur le calendrier
de la stratégie « Europe 2020 : une stratégie pour une
croissance intelligente, durable et inclusive » en lien
notamment avec l’une des initiatives de cette stratégie
« Une Europe efficace dans l’utilisation des ressources ».
En parallèle à l’élaboration de ce plan d’action,
une évaluation des plans de gestion des bassins
hydrographiques des États membres de l’Union
Européenne ainsi que de la politique de l’Union
Européenne concernant la rareté de l’eau et les
sécheresses, a été réalisée.
Celle-ci a mis en avant certaines difficultés dans la
législation actuelle sur l’eau notamment pour ce qui
est de sa mise en oeuvre. De nombreux conflits entre la
politique de l’eau et les objectifs des autres politiques
ont été soulignés.
D’autres évaluations seront, ou sont en cours de
réalisation, par la Commission Européenne afin de fournir
une base de connaissances approfondies pour améliorer
les politiques actuelles et atteindre les objectifs
imposés par la politique européenne de l’eau.
La Gartempe à Montmorillon (Vienne)
A voir sur le site de l’Eau en Poitou-Charentes du, Réseau Partenarial des Données sur l’Eau (R.P.D.E.) www.eau-poitou-charentes.org, rubriques :
-
- l’eau : échéance 2015 > L’ambition européenne
- l’eau : échéance 2015 > Le suivi près de chez moi

Pour aller plus loin